Jamais Marie ne s'était montrée aussi gaie qu'en ce moment. On eût dit que, le voile de l'oubli s'étendant sur tous les maux qu'elle avait soufferts, elle était revenue tout à coup au temps le plus heureux de sa première jeunesse, où elle aimait à folâtrer à côté de sa mère, et où chacune de ses sensations était une jouissance. Heureuse de sa joie, Julie, son amie, la contemplait dans un doux ravissement...Mon Dieu, qu'on est bien ici ! dit Marie en jetant autour d'elle des regards où se peignait le bonheur.!
COMME UN SOUVENIR
Un joyeux souvenir vient soulever la mer
De mon âme, ce soir dans l'extase éperdue:
Un vent soudain jailli d'un grand soir de l'hiver,
Le soir gorgé de lune où tu m'es apparue.
Ce n'était dans les airs que froissement de soie,
Emphase dans les bruits, prière au sein des champs;
Les étoiles d'argent brûlaient en feux de joie,
Le soir était sourire et mon âme était chant.
Avec la volupté du souffle bleu des ombres
Tu vins, ayant des fleurs de givre sur ta peau;
Une auréole était par-delà tes yeux sombres
Faite de neige blonde et de parfums nouveaux.
Et mon coeur t'obéit, tel un peuplier doux
Lorsque monte du vent la voix impérieuse.
Les nuages dansaient comme des rêves fous,
Je t'embrassai : la nuit chantait, insidieuse.